Le montant de l’assurance-vie s’élève à 2 070 milliards € selon la Banque de France (1 599 + 471,8). Il s'agit du placement préféré des Français. Le retour brutal de l’inflation et la hausse des taux d’intérêt initiée par les banques centrales risquent-ils de changer la donne et de faire apparaître des risques ? Oui, à l’évidence.

Ces deux mille milliards d’euros sont en effet constitués à 80% d’obligations en euros, de l’État français essentiellement, qui ne rapportent presque plus rien étant donné que nous venons de passer plusieurs années à taux zéro, voire négatifs par moment. En 2021, les fonds en euros ont offert un rendement moyen de 1,1%, ce qui n’est vraiment pas terrible, surtout quand l’inflation se met à décoller comme en ce moment.

Cette période de taux bas semble terminée, et cela constitue une bonne nouvelle pour les assureurs qui vont pouvoir proposer à leurs souscripteurs des produits qui rapportent un peu plus. Mais les choses ne sont pas aussi simples : les assureurs ne peuvent pas se débarrasser de toutes leurs obligations à taux zéro, car celles-ci subissent une forte décote sur les marchés. Les pertes seraient gigantesques. Pour simplifier à l’extrême : quand les taux d’intérêt passent de 1 à 2%, une obligation achetée 100€ qui rapporte un coupon – toujours fixe – de 1€ par an soit 1% par an, doit se vendre 50€ sur le marché de façon à ce qu’elle rapporte alors 2% par an, c'est-à-dire 1€ pour 50, ainsi sa valeur s’effondre de moitié. Il y a dont un effet retard considérable, les assureurs doivent attendre de "purger le passé".

Problème : les épargnants risquent de s’impatienter. D’autant que le Livret A rapporte désormais 2%, soit le double ! Si les taux d’intérêts continuent de remonter et si l’inflation perdure, la colère et l’incompréhension vont se répandre chez les détenteurs d’assurance-vie. Et il faut prendre en compte un autre phénomène : la chute du pouvoir d’achat avec l’explosion des prix et des salaires ou des retraites qui suivent bien imparfaitement. En conséquence, l’assurance-vie risque de faire face à une décollecte massive, pour aller vers d’autres placements, ou pour financer les dépenses courantes. Et les assureurs ne peuvent pas vendre leurs obligations à taux zéro à cause de pertes massives qui mettraient leur situation financière en jeu… Tel est le risque qui se profile à l’horizon.

Mais cette menace d’une décollecte massive qui mettrait en péril les assureurs a déjà été prise en compte par ceux qui nous gouvernent avec la loi Sapin2, qui permet tout simplement de bloquer les retraits (nous en parlions déjà en 2016). En cas de crise sévère touchant les assureurs, les primes ne seraient plus versées et les retraits deviendraient impossibles. Si les épargnants français s’engageaient dans un mouvement important de retrait de leurs fonds actuellement sous forme d’assurance-vie, ce mécanisme se déclencherait et ils seraient dans l’impossibilité de récupérer leur argent. "C’est pour votre bien" ajouterait aussitôt le gouvernement, évidemment. Un tel scénario n’a rien d’imaginaire. Au contraire, la violence de la crise énergétique dans laquelle nous entrons aura inévitablement d’énormes impacts sur les banques et les assurances. Une crise financière n’a rien d’improbable dans l’agenda angoissant qui s’ouvre devant nous.

Disposer de son argent quand on le souhaite, cela n’a rien d’automatique dans notre système financier. Pour avoir cette liberté, il ne faut pas trop dépendre de lui et savoir placer ses économies ailleurs (or physique, cryptos et actifs réels divers, à condition de bien s’y connaître). Un élément à prendre en compte dans ses choix d’épargne…

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