Le cours de l’or progresse — davantage en dollars qu’en euros, en raison de la dépréciation de la devise américaine — tout comme celui du bitcoin. Les actions, elles aussi, repartent à la hausse : le S&P 500 a déjà effacé les pertes liées à la mini-crise des droits de douane. C’est déjà en soi un peu bizarre, car l’or et les actions évoluent généralement en sens inverse. En période de croissance, les investisseurs se portent logiquement sur les actions, et quand les craintes apparaissent, sur l’or. Les obligations souveraines sont globalement en difficulté — comme en témoigne la remontée des taux — la dette américaine en tête (lire "Le pari fou de Bessent"), tandis que l’immobilier stagne ou recule, aux États-Unis et en Europe.
Comment interpréter ces évolutions ? La dette se porte mal, en particulier sa partie "premium", la dette fédérale américaine, du fait que Trump laisse filer un déficit budgétaire désormais de plus en plus difficile à financer — nous en avons parlé. Et l’immobilier est un marché de dette — la plupart des acquisitions se faisant à crédit — qui souffre lorsque les taux montent. Ainsi, au lieu d’un arbitrage entre divers placements en fonction des données économiques et financières, nous assistons à un début de fuite (pas encore panique) du marché obligataire vers ce qui possède de la valeur intrinsèque.
Les montants en jeu sont colossaux : on raisonne désormais en milliers de milliards de dollars (dette US = 36 000 milliards $). Lorsque les mouvements de capitaux s’enclenchent, leur puissance est tellurique. Pour l’instant, les transferts restent mesurés, mais on voit clairement les points de départ et d’arrivée.
Dans le monde des crypto-actifs, un terme a acquis une certaine notoriété : le flippening. Il est apparu en 2017 pour décrire la possibilité que l’ether (ETH) dépasse un jour le bitcoin (BTC) en capitalisation. Aujourd’hui, on n’en parle plus, tant l’écart est important et continue de se creuser. Certains bitcoiners ont repris le terme flippening pour désigner le moment où le bitcoin dépassera l’or en valeur totale. Mais avec un rapport actuel de 1 pour 10, cette perspective reste encore lointaine.
En revanche, je voudrais populariser un nouveau flippening : lorsque l’or (23 000 milliards $ pour 216 000 tonnes au total dans le monde) dépassera la dette fédérale américaine (36 000 milliards $), pour devenir le premier actif mondial (le premier actif homogène, l’immobilier ou la Bourse désignant une multitude d’actifs différents). Nous y sommes presque !
Imagine-t-on la déflagration mondiale qu’un tel basculement provoquerait ? Cela pourrait bien survenir plus vite qu’on ne le pense, dans une poignée années tout au plus… En avant pour le flippening de l’or sur la dette US !
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