Dès lors que la banque centrale manipule les taux d'intérêt, cela engendre invariablement des effets pervers, un phénomène que l'on observe de manière plus générale chaque fois que l'État intervient. Comme l'écrivait le grand économiste libéral français Frédéric Bastiat (1801-1850) : "L’État, c’est la grande fiction à travers laquelle tout le monde s’efforce de vivre aux dépens de tout le monde." Et lorsqu’il intervient, il y a "Ce qu’on voit et ce qu’on ne voit pas", pour reprendre le titre d’un de ses ouvrages.
Pendant des années, nous avons vécu avec des taux d’intérêt nuls, voire négatifs. La BCE et la Fed ont justifié cette politique en invoquant des raisons valables, notamment pour faire face à des événements majeurs tels que l'éclatement de la bulle technologique en 2000, les attentats du 11 septembre 2001, la crise des subprimes, la crise grecque et les coûts considérables liés aux mesures de confinement. Désormais, elles relèvent leurs taux d’intérêts pour une raison tout aussi excellente : vaincre l’inflation.
Le problème réside dans le fait que les ménages de base, disons de la classe moyenne, qui aspirent à devenir propriétaires se retrouvent systématiquement perdants. C’est ce que nous appelons le "dilemme taux/immobilier", un nouvel ajout à notre liste d'effets pervers résultant de l'intervention de l'État.
Le dilemme taux/immobilier :
- Taux d’intérêts nuls ou négatifs (2000-2022) : le crédit est bon marché, très bien, mais les prix de l’immobilier s’envolent parce qu’il devient un actif rare capable de stocker de la valeur face à l’expansion monétaire. Au final, les deux effets s’annulent. Et sur la durée, la croissance des prix dépasse le gain apporté par un prêt bon marché. L’acquéreur est perdant.
- Taux d’intérêts élevés, proches ou dépassant l’inflation (depuis 2022) : le crédit devient trop cher, difficilement accessible, les prix de l’immobilier baissent suite à la chute des ventes, mais très peu de ménages peuvent en profiter. Les deux effets s’annulent encore une fois. Et sur la durée, la pénurie (l’incapacité à devenir propriétaire) s’installe.
Qui est gagnant à tous les coups ? Les possédants, ceux qui détiennent un patrimoine immobilier en plus de leur résidence principale. Ils peuvent arbitrer de façon à s’enrichir, quelle que soit la conjoncture : vendre lorsque les prix sont au plus haut, accroître leur parc en profitant du crédit bon marché, ou sinon gager leur immobilier pour obtenir facilement un prêt et acquérir des biens à prix cassés lorsque les taux d'intérêt sont élevés. Comme toujours, les manipulations monétaires accroissent les inégalités et appauvrissent ceux qui n’ont pas de capital.
Au-delà de cette différence de taux d’intérêt, le changement brutal de politique monétaire des banques centrales en 2022 a pris tout le monde au dépourvu, provoquant des perturbations sur les marchés (immobilier, crédit, mais aussi obligations, actions… avec des menaces sur la stabilité bancaire).
Avec un taux d'intérêt "normal", qui serait légèrement supérieur à l'inflation, déterminé par le marché et restant stable, les choses se dérouleraient de manière équilibrée pour tous, sans formation de bulles immobilières, avec rien de plus qu'un crédit coûteux. Malheureusement, cette époque semble révolue : en cas de récession sévère ou de crise bancaire, les banques centrales sont susceptibles de ramener les taux d'intérêt vers zéro, pour ensuite les relever brutalement.
Alors, que faire ? Il faut se rappeler qu’un actif comme l’or physique ne génère pas d'intérêts et qu'il est, par conséquent, imperméable aux décisions erratiques des banques centrales (auxquelles il n’est pas relié directement comme les obligations ou le marché du crédit, même s'il peut l'être indirectement, bien sûr). Une façon d’être tranquille, de s’appuyer sur sa valeur intrinsèque plutôt que de subir les versatiles décisions étatiques.
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