Les dirigeants de la Banque centrale européenne (BCE) et de la Réserve fédérale des États-Unis (Fed) nous ont longtemps promis que leur politique monétaire laxiste n'engendrerait pas d’inflation, puis ensuite qu’il ne fallait pas s’inquiéter et qu’elle serait "transitoire". Ils concèdent désormais que le transitoire pourrait se prolonger, mais continuent de nous vendre le "retour à la normale". Eh bien non, l’inflation va durer, et voici pourquoi.

La croissance rapide de la création monétaire, que l’on voit à travers l’explosion du bilan de la BCE et de la Fed, se retrouve en partie directement consommée (monnaie de transaction), ce qui pousse les prix des biens et services à la hausse. Le surcroît de monnaie fait valser les étiquettes, c’est le mécanisme le plus basique de l’inflation.

Mais la part de monnaie qui est épargnée produit aussi son effet : lorsqu’elle s’investit dans les obligations d’État (via l’assurance-vie pour les particuliers, par exemple), elle en fait monter le prix (ce qui se traduit par une baisse du taux d’intérêt). Lorsqu’elle s’investit dans les actions, les cours progressent, et idem dans l’immobilier, le marché de l’art…

La monnaie qui se place sur les actifs financiers et les actifs réels fait monter leur prix, ce qui constitue aussi une "inflation", pas au sens strict, bien sûr, puisque les organismes statistiques ne prennent en compte que les biens de consommation, mais tout de même, et les ménages le ressentent douloureusement lorsqu’ils doivent acquérir leur logement.

L’autre effet de cet accroissement de monnaie est la dépréciation du taux de change, ce qui renchérit le prix des biens importés. On le voit dans plusieurs pays émergents (la Turquie, 30% de dépréciation par rapport au dollar, 20% d’inflation en 2021), un peu au Japon, pas encore sur l’euro mais c’est à surveiller.

L’autre cause majeure de l’inflation ne provient pas des banques centrales, mais d’un virage majeur des pays occidentaux : la transition énergétique. Elle va coûter une fortune ! D’un côté il y a destruction de capital (les centrales au charbon et – pour une part – les centrales au gaz, l’automobile à moteur thermique, l’exploitation pétrolière), puis de l’autre des investissements massifs (énergies renouvelables, voiture électrique, isolation) et à faible rentabilité. Comme l’indique une étude Natixis, "ces investissements ne sont réalisables que si les taux d’intérêt à long terme sont bas […] La transition énergétique, qui va amputer le pouvoir d’achat des ménages avec les prix plus élevés et plus variables de l’énergie, pousserait alors la BCE à maintenir une politique monétaire expansionniste."

Selon de nombreux économistes, il n’y aura pas d’inflation durable car il n'y a pas de spirale prix-salaires comme lors des années 1970, dans laquelle l’un entraînait l’autre. Mais c’était un autre modèle, une autre époque. Certes, les salaires n’augmentent pas ou peu, ce qui est destructeur pour le pouvoir d’achat, mais l’argent créé ex nihilo alimente bien la "machine" économique : des salariés payés à rien faire durant les confinements (en Europe), des entreprises maintenues en vie avec les subventions étatiques ou grâce aux taux zéro (entreprises-zombies), des subventions massives pour la transition énergétique (renouvelables, voitures électriques, isolation), de vastes programmes de rénovation d’infrastructures (aux États-Unis), etc. Il ne faut pas se focaliser sur le salaire. Une spirale revenus-prix est en train de se mettre en place et va alimenter et propulser les prix pour longtemps ! L’inflation est bien là pour durer et, l’histoire le montre, pour détruire nos économies.

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