En ces temps d’inflation, l’immobilier pourrait apparaître comme une solution pour protéger son patrimoine sur le long terme. Cela s’est certes vérifié par le passé, mais ce ne sera plus forcément le cas. Pourquoi ?

L’actuelle remontée des taux d’intérêt rend l’emprunt immobilier plus difficile. La demande se raréfie, entraînant normalement une baisse des prix ; le mouvement inverse auquel nous avons assisté depuis le début des années 2000. Alors effectivement, les prix de l’immobilier amorcent une décrue à Paris (qui donne le la) et en France en général, par-delà les situations locales différenciées. Mais en réalité ils ne baissent pas tant que ça, ou pas autant que prévu face à des taux d’emprunt passés de 1% début 2022 à certainement 4% cet été - une progression rarement vue.

Alors que se passe-t-il ? Une crise du logement s'installe en France, avec une chute d’un tiers des achats de logements neufs et anciens, ainsi – plus grave – que de la construction. La hausse des taux d’intérêt ne peut expliquer à elle seule cette dépression multiforme.

Cette crise vient en grande partie d’une accumulation de réglementations contraignantes qui s’abattent sur le logement :

- Le Diagnostic de performance énergétique (DPE), obligatoire pour toutes les locations. Les plus mal classées (G) ne peuvent plus être louées, soit de nombreux biens qui disparaissent du marché locatif (très peu de propriétaires veulent faire les travaux, d’autant que les loyers sont très contrôlés. Ils préfèrent vendre, quitte à encaisser une décote) ;

- L’Audit énergétique, obligatoire pour toute vente d'un bien immobilier ayant un DPE faible, avec un devis des travaux d’isolation à entreprendre, ce qui entraîne une décote de 30% à 40% dans les zones non tendues ;

- La Zéro artificialisation nette (ZAN) qui oblige les communes à diminuer leur rythme d’extension des habitations, ce qui renchérit automatiquement le foncier ;

- La norme environnementale RE2020 qui renchérit le coût des matériaux de construction ;

- L'obligation pour les constructions d’inclure un pourcentage de logements sociaux (souvent de l’ordre de 30%), ce qui oblige le promoteur à se "refaire" sur ceux vendus aux particuliers, augmentant ainsi leurs prix.

Nous en avons certainement oublié... et d’autres réglementations vont s’abattre prochainement, imposées elles aussi par l’Union européenne : en 2028 les nouveaux bâtiments devront être à émissions nulles, puis en 2050 tous les bâtiments existants devront répondre à cette obligation, ce qui obligera à des travaux de rénovation gigantesques, ou à détruire pour reconstruire. Comme le dénonce le think tank libéral, l’IREF : "En vertu de cette directive, les États s’approprieront le droit de diriger la construction, la reconstruction et la modification de bâtiments permettant de réduire leur PRP [potentiel de réchauffement planétaire !] pendant leur durée de vie." Car tout ceci est fait au nom de la lutte contre le réchauffement climatique anthropique…

Toutes ces injonctions déstructurent l’immobilier, qui est de moins en moins un "marché" et dépend de plus en plus de la législation, c’est-à-dire de l’État. Cette étatisation (pour ne pas dire soviétisation) du logement est catastrophique. Elle mène déjà à une crise du marché locatif, avec une explosion de la demande non satisfaite, le franchissement de la barre des 3% d’impayés, et des loyers qui ne suivent pas les prix d’acquisition et les charges (XerfiCanal).

Les prix de l’immobilier devraient baisser compte tenu de la hausse des taux d’intérêt et de la baisse du pouvoir d’achat due à l’inflation. Mais ils ne le font qu’imparfaitement, pour de mauvaises raisons : contraintes, interdictions, surcoûts, etc. provoqués par l’escalade réglementaire. En conséquence, investir aujourd’hui dans l’immobilier ne constitue pas vraiment une bonne idée (on préférera l’or physique, dont les prix sont également peu volatiles, mais orientés à la hausse - une alternative rassurante).

Immobilier dysfonctionnel et vague d’inflation produisent déjà des effets, dont certains étonnants : dans le très chic 7e arrondissement de Paris, dans l’une des rues commerçantes les plus cotées, rue Cler, vient d’ouvrir une enseigne de hard discount (Aldi, comme je l’ai signalé) ! À près de 15 000 euros le mètre carré, un prix qui baisse peu, les traites du crédit immobilier pèsent lourd. Et comme les salaires suivent imparfaitement la hausse des prix, il faut bien aller se ravitailler dans ce local mal éclairé où les produits sont présentés dans leur carton de livraison, discrètement, comme si on allait aux Restaurants du cœur… La crise ne fait que commencer.

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