Il n’y a pas que l’État qui est endetté, même si c’est de lui dont on parle le plus. La dette publique au sens large (État + collectivités locales + sécurité sociale) s’élève à 2375 milliards €, selon le dernier décompte de l’INSEE, soit quasiment 100% du PIB (99,5% exactement). Elle suscite l’inquiétude même si le contexte des taux négatifs offre un répit.
Mais les ménages sont également endettés, particulièrement avec l’immobilier. « Bercy veut éviter l’emballement du crédit immobilier » titre Le Figaro, qui relève que cette dette atteint 1300 milliards €. Voilà qui pose un sacré problème aux banques car la concurrence féroce à laquelle elles se livrent a amené le taux d’intérêt moyen (toutes durées confondues) à un niveau historiquement bas de 1,18% en septembre, selon l’Observatoire Crédit Logement/CSA. La rentabilité du secteur bancaire est atteinte de plein fouet, nous l’avions signalé en juillet dernier, et le Haut Conseil de stabilité financière (HCSF) s’en inquiète : la "profitabilité dégradée des crédits à l’habitat" a de quoi "fragiliser le secteur". Le 23 septembre dernier, le Comité européen du risque systémique (CERS) avait lui aussi adressé des "avertissements" à cinq pays sur les "vulnérabilités" de son immobilier résidentiel, et la France en faisait partie.
Et n’oublions pas les entreprises (la dette "corporate"), dont le niveau d’endettement est comparable à celui de la Chine, un pays drogué à la dette. Avec plus de 140% du PIB, les entreprises non-financières françaises (donc sans prendre en compte les banques) ont un endettement supérieur de 35% à la moyenne de la Zone euro (105,1%), ce qui les positionne quasiment au niveau chinois (155,6% du PIB). Une dette pour quoi faire ? Pour compenser une faible rentabilité, le mal chronique des entreprises françaises (à cause du niveau élevé des taxes et impôts), pour compenser la faiblesse de l’autofinancement et des apports en fonds propres (découragés par une fiscalité prédatrice). Pour l’instant, cette dette est un cache-misère : la baisse des intérêts payés par les entreprises françaises représente la totalité de la hausse de leur profitabilité depuis 2008.
En faisant l'addition, on arrive à une dette totale de trois fois le niveau du PIB (100 + 55 + 140 = 295), et cela ne tient pas compte des dettes de consommation des ménages et des dettes bancaires. Bien sûr, on compare un stock (la dette) à un flux (le PIB), mais il s’agit d’un indicateur international, et c’est aussi le flux de revenu qui permet de faire face à la dette. Ça devient donc de plus en plus difficile pour la France dans toutes ses composantes (État, ménages, entreprises).
Une dette, surtout, qui ne sert à rien économiquement parlant : l’État ne s’en sert pas pour investir mais pour payer les salaires de fonctionnaires bien trop nombreux, les ménages courent après des prix qui augmentent à cause de la planche à billets de la BCE et d’une législation de la construction très contraignante, et les entreprises cherchent à compenser une rentabilité inférieure à leurs concurrents internationaux due à une fiscalité plus lourde. Tout le monde est perdant, mais la dette permet de reporter l’échéance…
Au centre se trouvent les banques, qui seraient les premières affectées en cas de forte de hausse du taux de défaut des emprunteurs. Il est temps de prendre ce problème à bras-le-corps, car cette dette fragilise grandement la France en cas de crise ou de retournement conjoncturel.
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