On se pose la question de savoir si l’inflation revient ou pas, mais elle est en fait présente depuis longtemps. La nouveauté est simplement qu’elle se généralise.

La planche à billets provoque une hausse des prix, c’est ainsi, et les rotatives des banques centrales sont actives depuis le début des années 2000 (baisse des taux d’intérêt suite au krach des valeurs Internet en 2000 puis aux attentats du 11 septembre 2001). Elle s’est renforcée avec la crise des subprimes de 2008, avant d'atteindre des niveaux délirants depuis la pandémie du Covid et les confinements.

Sauf que, jusqu’ici, cette hausse des prix se localisait dans les actifs – on parle d’inflation d’actif – comme les actions ou l’immobilier. La concurrence internationale tirait les prix vers le bas, notamment avec l’entrée de la Chine dans l’Organisation mondiale du commerce en 2001, lui ouvrant ainsi les marchés occidentaux (la planche à billets et l’arrivée de la Chine à l’OMC se font la même année… disons que cette coïncidence tombe bien). La déflation sur de nombreux biens (textile, électroménager, électronique, etc.) s’est traduite notamment par un transfert des usines de l’Europe et des États-Unis vers l’Asie. Un dommage collatéral. Mais les Bourses se portent très bien, ainsi que l’immobilier, comme en Allemagne où les prix suivent remarquablement la taille du bilan de la BCE :

 

 

En France, la hausse de l’immobilier a commencé dès le début des années 2000. Les organismes statistiques officiels n’ont pas mesuré de hausse du taux d’inflation parce qu’ils minorent la part du logement. En effet, ils considèrent que l’acquisition de l’habitation principale constitue un investissement et qu'il n’a donc pas à figurer dans "l’indice des prix à la consommation". Une position très critiquable étant donné que cet achat représente une étape normale pour la plus grande partie des ménages. En outre, il ne s’agit pas d’un placement, car il ne rapporte rien ; il coûte même, en entretien et en taxes.

Ce parti pris statistique est critiqué depuis quelque temps par la Banque centrale européenne. Ainsi, Christine Lagarde a déclaré en septembre 2020 que si la BCE n'était pas en mesure de changer la mesure de l'inflation, celle-ci devrait "saisir les coûts auxquels les gens sont confrontés dans leur vie quotidienne et refléter leurs perceptions", y compris le coût de l'immobilier. Et encore récemment sur son site, dans un style pondéré mais explicite : "Les dépenses liées aux maisons et aux appartements lorsque les occupants en sont propriétaires et l’inclusion de ces coûts dans le calcul de l’IPCH demeurent sources de problèmes. Dans le cadre de son évaluation stratégique de la politique monétaire, la BCE analyse actuellement le rôle éventuellement joué par ces dépenses dans la mesure de l’inflation."

Bref, la nouveauté c’est que l’inflation se généralise : elle touche désormais la plupart des biens de consommation, comme nous l’avons montré, à commencer par l’électricité et l’énergie en général (très coûteuse "transition énergétique"…), les matières premières, les matériaux de construction, etc. Au lieu d’impacter seulement les acquéreurs de logement, elle va toucher l’ensemble des consommateurs. Le pouvoir d’achat de tout le monde va en souffrir… Même si les organismes statistiques officiels disposent encore de quelques subterfuges (comme "l’effet qualité" qui tire artificiellement vers le bas les prix des biens technologiques), ils seront cette fois obligé de le reconnaître.

On ne peut pas échapper à la malédiction de la planche à billets. Ses conséquences peuvent être sournoises ou explicites, immédiates ou à retardement, progressives ou brutales, mais on paye toujours la note.

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