La Russie s’apprêterait à doubler l’extraction d’or sur son territoire afin d’en devenir le deuxième producteur mondial, devant l’Australie et derrière la Chine. Et cela alors que Moscou a encore augmenté massivement son stock en décembre. Philippe Herlin, chroniqueur pour OR.FR, nous aide à décrypter l’amour russe pour le métal jaune.

Ruée vers l’or à la russe. D’après les informations de Gold Telegraph, reprises par OR.FR, la Russie s’apprêterait à doubler ses extractions d’or, pour devenir le deuxième producteur mondial, devant l’Australie et derrière la Chine. Une information qui, si elle venait à se confirmer, montrerait encore davantage que Moscou a clairement décidé de miser sur le précieux métal.

 

 

​La Russie n’en finit plus d’augmenter ses réserves de métal jaune. En décembre, sa Banque centrale a augmenté son capital or de 159 tonnes, le portant à 2.270,56 tonnes, soit 73 millions d’onces. Le pays est aujourd’hui le cinquième détenteur mondial derrière la France (2.436 tonnes), l’Italie (2.452 tonnes), l’Allemagne (3.370 tonnes) et les États-Unis (8.133,5 tonnes).

Si la Russie a été le pays qui a le plus acheté d’or en 2019, elle est loin d’être la seule à convoiter le précieux métal. Les Banques centrales de nombreux pays acquièrent de l’or en quantité. Les achats de métal jaune par ces dernières ont augmenté de 12% entre janvier et septembre 2019, selon le Conseil Mondial de l’Or (World Gold Council), alors que 2018 avait déjà été une année record en 50 ans avec 651,5 tonnes d’or vendues aux différentes Banques centrales du globe.

 

 

Philippe Herlin, docteur en économie du Conservatoire National des Arts et Métiers, auteur de "L’or, un placement d’avenir" aux éditions Eyrolles et chroniqueur pour le site OR.FR, livre à Sputnik France son analyse de cette ruée vers l’or.

Sputnik France : Comment expliquez-vous cet attrait de la Russie pour l’or ?

Philippe Herlin : Ce que fait la Russie s’inscrit dans un mouvement global. Elle est loin d’être la seule à s’intéresser à l’or. Par exemple, vous avez la Chine qui est le premier producteur mondial et qui s’emploie à garder pour elle l’or qu’elle extrait, ce vers quoi s’oriente la Russie. C’est une approche très nationale. Depuis plusieurs années, il y a une volonté de certaines Banques centrales, notamment celles des pays producteurs de pétrole ou d’Asie, de se remettre à racheter de l’or. Elles le font dans une démarche visant à moins dépendre du dollar et des bons du Trésor américains.

Sputnik France : L’augmentation massive des réserves d’or de la Russie joue donc un rôle dans sa volonté de dédollarisation ?

Philippe Herlin : Tout à fait. Mais cela ne se traduit pas uniquement par l’or. Par exemple, les Chinois signent des accords avec des Banques centrales d’Asie pour que le yuan remplace progressivement le dollar comme monnaie de transaction. Mais disons que l’or apporte une crédibilité, une assurance et une sécurité au rouble ou au yuan par rapport aux contractants. Les États-Unis, bien que premiers détenteurs d’or au monde, comptent surtout sur leur puissance économique et militaire pour donner confiance dans le dollar. La Russie a d’autres cartes à jouer. Elle doit insister sur l’or pour crédibiliser le rouble.

Sputnik France : Voir autant de Banques centrales se ruer sur l’or est-il le signe que quelque chose de grave se prépare sur la planète économie ?

Philippe Herlin : On voit en prenant du recul que la quantité de dettes, qu’elle soit publique ou privée, ne cesse d’augmenter dans le monde. On a dépassé le record de 2008 avant la crise. Des pays comprennent que ce système financier n’est pas viable à terme. Dans un tel cadre, revenir à l’or, qui est la monnaie multimillénaire et la devise de confiance absolue, est une façon pour un certain nombre de pays de se préparer à une future crise financière et bancaire.

Source originale: Sputniknews

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