L’année 2016 commence très mal pour les bourses mondiales ; elles ont perdu environ 10% de leur valeur depuis le 1er janvier, l’un des pires débuts d’année de l’histoire boursière. Depuis leur plus haut en juin dernier, les marchés actions dans le monde ont baissé de 20%, selon Bloomberg, ce qui correspond à 15 000 milliards de dollars de valeur boursière volatilisés en fumée.
L’ampleur et la durée de ce repli des cours semblent indiquer une sévère glissade de plusieurs années, telle qu’on en a connu après les sommets de 2000 et de 2007. Cependant, malgré tout, les intervenants veulent majoritairement croire à un accident de parcours ou à une purge qui permettra de retrouver une nouvelle phase de progression. Il est vrai qu’à l’époque, les causes des crises apparaissaient clairement (krach des valeurs Internet en 2000, subprimes en 2008), alors que, cette fois, on ne distingue pas où se trouve le baril d’explosifs.
La raison est pourtant simple : ça va mal partout ! Ou, si l’on veut identifier le coupable, nous sommes dans une crise de la dette, et de la dette, il y en a partout. Il y a trop de dette chez les États (très peu de pays dans le monde équilibrent leurs comptes), dans certaines entreprises (obligations à haut rendement, ou high-yield, souvent pourries), chez certains ménages (dette étudiante aux U.S., bulle immobilière au RU et dans certains États américains) et, surtout, dans les banques (créances douteuses, faiblesse des fonds propres par rapport à leurs engagements, de l’ordre de 1/30 en Europe). La chute du prix du baril de pétrole constitue certes une cause de la crise pour les pays exportateurs, mais elle révèle aussi que la montagne de dette investie dans le pétrole de schiste aux États-Unis a grandi trop vite et trop facilement. Les taux zéro ont joué le même rôle de facilitateur que pour la bulle des subprimes, et on connaît le résultat.
Toutes ces dettes deviennent de plus en plus lourdes à porter à mesure que la situation de l’économie réelle se dégrade : panne de croissance au Japon et en Europe, croissance réelle de l’ordre de 2% en Chine seulement, impossibilité pour les États d’augmenter encore la pression fiscale (et incapacité à diminuer leurs dépenses, essentiellement sociales et clientélistes), augmentation des créances douteuses dans les banques (notamment en Italie). Résultat, ça craque de partout.
L’agence Bloomberg signale ce chiffre anecdotique mais révélateur de la situation économique : il coûte désormais moins cher de louer à la journée un navire marchand de 335 mètres de long (1100 pieds) qu’une Ferrari F40. La crise touche l’économie réelle mais pas encore le trader qui loue sa voiture de luxe, mais ça ne saurait tarder.
La preuve que les marchés n’ont pas compris ce qui se passe : après plusieurs jours de recul, ils ont nettement rebondi jeudi et vendredi dernier, suite aux déclarations de Mario Draghi affirmant qu’"il n'y a pas de limites" à l'utilisation des instruments de politique monétaire et qu’il agirait sans doute dès le mois de mars. Et pourquoi pas un nouveau plan de Quantitative Easing, un QE4, de la part de Janet Yellen ? Encore un bol de punch de la Fed et de la BCE ? Cette croyance en la toute puissance des banques centrales – les totems modernes de notre économie – est suicidaire. Mais les marchés ne le savent pas encore.
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