Nous avons expliqué dans ce texte que les LTRO, c'est-à-dire les prêts géants de 1.000 milliards d’euros au total de la BCE en faveur des banques européennes, sont assimilables aux plans de Quantitative easing de la Fed, autrement dit à de la planche à billets. Une partie de cet argent ne pourra pas être remboursé et la BCE sera obligée de faire "rouler la dette", c'est-à-dire de proposer un nouveau prêt géant.
Les échéances se rapprochent, les LTRO sont des prêts à 3 ans et ils ont été lancés en décembre 2011 et en février 2012. Ils arrivent donc à échéance en décembre 2014 et en février suivant, c'est-à-dire très bientôt. Selon la Banque d'Italie, sur les 255 milliards d'euros de fonds LTRO accordés par la BCE, les banques italiennes ont remboursé 15 % de ce montant, soit 38 milliards d'euros. Reste donc 217 milliards à trouver en 2014... Pour l’Espagne les montants sont équivalents.
Les banques italiennes et espagnoles pourront-elles rembourser ces sommes ? On peut en douter lorsque l’on découvre la contraction de leur activité : le crédit aux entreprises non financières baisse de 5,7% (en octobre 2013 sur les douze derniers mois) pour les banques italiennes et de 19,3% pour les banques espagnoles ! Le crédit à la consommation et les prêts immobiliers sont également orientés à la baisse. Le crédit constitue une des composantes essentielle du "chiffre d’affaires" des banques, et il se replie nettement, on le voit.
Ces mauvais chiffres démentent également tous les discours de la BCE consistant à expliquer que les liquidités qu’elle fournit avec les LTRO ainsi que son taux directeur pratiquement à zéro (0,25%) ont pour objectif de soutenir le crédit… Ca ne marche pas, donc continuons ! En fait la BCE y est obligée car ne pas faire un nouvel LTRO provoquerait des faillites bancaires en Espagne et en Italie. Il est donc urgent d’éloigner ce risque avec un nouveau programme d’assouplissement quantitatif. Les marchés qui, en l’occurrence, ont tendance à confondre liquidité et solvabilité seront rassurés, Mario Draghi pourra parader et les chefs de gouvernement pourront annoncer que "la crise est derrière nous".
Tout cela, on s’en doute, ne plait pas à l’Allemagne. Le problème cependant est qu’elle perd la main au sein de la BCE, sa position devient minoritaire. Le nombre de pays qui souhaitent ou se satisfont d’une politique d’assouplissement monétaire dépasse désormais clairement ceux qui la redoutent, les "colombes" ont pris le pas sur les "faucons".
Il s’agit donc en ce moment, pour la BCE, d’amadouer l’Allemagne… On évoque un LTRO qui serait versé aux banques qui s’engagent à accroître leurs crédits aux entreprises, mais comment obliger une banque à prêter plus ? La BCE pourrait racheter des crédits de PME titrisés (en échange d’argent frais pour les banques donc), mais est-ce la fonction d’une banque centrale de détenir de tels actifs ? Quoi qu’il en soit, la BCE comptera sur l’urgence face aux difficultés des banques italiennes et espagnoles pour imposer un nouveau déluge de liquidités.
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