Nous verrons vendredi 5 août où en sont les stocks d’argent du LBMA, mais nous savons d’ores et déjà que ceux du COMEX diminuent tous les jours.

Voici un état des lieux, le mardi 26 juillet :

 

 

Regardez la ligne SLV : le 26 juillet, les stocks ont diminué de 45,6 Moz en un mois.

Le lendemain, mercredi 27 juillet, les stocks à vendre (« registered ») sont tombés à 57,8 Moz et le stock global du COMEX a chuté de 3% dans la journée.

Le stock d’argent « registered » de JP Morgan au COMEX n’est plus que de 19,6 Moz, alors qu’il approchait les 39 Moz en mars (source).

Le stock de l’ETF SLV a diminué de 11,47 Moz ce jour-là, pour atteindre 484 Moz (source).

À Shanghaï, le stock d’argent, qui était à son plus haut en janvier 2021 à 3091 tonnes (109 Moz), a chuté à 141 tonnes (49 Moz) le 27 juillet. 

Jeudi 28 juillet, le stock « registered » du COMEX est tombé à 55,7 Moz !

 

 

Graphiquement, chaque fois qu’une résistance est franchie, les cours doivent toujours venir la re-tester pour vérifier qu’elle est devenue un support. C’est un pullback.

En pratique, les bullions banks en charge de maîtriser les cours des métaux précieux prennent des positions vendeuses (short) à chaque résistances franchies et revendent ces short lorsque les cours viennent re-tester la résistance. La très violente poussée haussière de juillet-août 2020 avait été faite sans pullback sur la résistance qui bloquait les cours depuis 2014. Depuis deux ans, les bullions banks avaient de lourdes positions vendeuses, qui risquaient de devenir très coûteuses si le prix de l'argent s’envolait du fait de la pénurie croissante.

Depuis le 14 juillet, les cours de l’argent sont venus tester à plusieurs reprises le support à 18,35 $, permettant aux bullions banks de revendre leurs positions short.

 

 

Sur les COT du COMEX du 27 juillet, les "Large Speculators » (c.-à-d. les Hedge Funds) sont passés short, alors que les « Commercial » (c.-à-d. les banques) n’ont plus que 2 666 contrats short, donc 13 Moz.

Les « Large Traders » sont désormais short de 22 Moz sur le COMEX.

 

 

Ce graphique, qui date déjà d'une semaine, montre que les positions des banques sont exceptionnellement haussières.

Pour Andrew Maguire, les banques étaient acheteuses (long) sur le LBMA depuis plusieurs mois, leurs positions short sur le COMEX n'étant qu'une couverture (hedge). 

 

 

Dans les eaux troubles du COMEX

Si le marché OTC (de gré à gré) du LBMA est extrêmement opaque, ce qui se passe dans les coulisses du COMEX ne l’est pas moins.

Outre les énormes besoins en argent du secteur photovoltaïque, la demande de physique générée par le mouvement des Wall Street Silver, ou encore la crise énergétique dessinée par la COP26 et amplifiée par les sanctions américaines contre la Russie, ce qui se passe actuellement sur les stocks d’argent est probablement le dénouement du short-squeeze du 24 février 2022, qui a été étouffé.

 

 

Ces faits ont été dévoilés par Ditch des Wall Street Silver, qui réalise un remarquable travail de suivi de chacun des acteurs agréés sur le COMEX.

- Le jeudi 24 février à minuit, il y avait 113,7 Moz d’argent en demandes de livraison, alors qu’officiellement il n’y avait que 80 Moz à vendre au COMEX.

- Le vendredi 25 février au matin, il n’y avait plus que 79,9 Moz d’argent en demandes de livraison, soit la quasi-totalité de l'argent à vendre.

- Le mardi 1er mars, il y avait encore 42,86 Moz attendant d’être livrées, alors que JP Morgan avait déplacé 480 000 onces de la catégorie « eligible » (non à vendre) à « registered » (à vendre) et que 5,5 Moz avaient officiellement quitté les entrepôts de SLV.

JPM déplace chaque jour des petites quantités du stock « eligible » vers le stock « registered », avant de livrer les demandes en attente.

D’une part, il y a eu beaucoup de demandes de livraisons supplémentaires, qui sont venus s'accumuler jour après jour…

D’autre part, le stock théorique d’argent « registered » est remonté de manière magique à 93,5 Moz … alors même que l’argent « eligible », qui était à 248,4 Moz le 27/01/2021, est aujourd’hui à 250,3 Moz.

Il y a quelque chose de magique avec l’argent-papier !

Dans le même temps, le nombre d’EFP émis par le COMEX pour être livré à Londres s’avère conséquent :

- Février 2022 : 72,39 Moz

- Début mars 2022 : 115,61 Moz en seulement 10 jours. On s’achemine vers un nouveau record historique.

En suivant ce feuilleton passionnant au jour le jour, voilà l’état des lieux du COMEX le 27 juillet :

 

 

Petite cuisine interne ou gros problème ?

Short Squeeze

Le problème apparu sur le COMEX le 24 février 2022 serait notamment lié à l’intervention russe en Ukraine, qui a été déclenchée à cette date. Le gouvernement américain avait prévenu que la Russie entrerait en guerre à partir du 16 février, date à laquelle les demandes de livraison ont commencé à se multiplier.

Il faut ce souvenir que le 12 novembre dans "Live From  the Vault"  Episode 52, Andrew Maguire a annoncé que la banque Standard Chartered avait acheté toute la production à venir jusqu’à l’été 2022 d’un de ses plus gros fournisseurs. Dans l’épisode 65, Maguire révèle que Standard Chartered a raflé toute la production d’argent des deux plus gros affineurs russes jusqu’en juillet et a hedgé cet achat de physique sur le COMEX pour dégager des liquidités.

Mais avec la guerre en Ukraine, l'argent physique russe a d’abord été bloqué, puis très vite interdit. Standard Chartered se retrouvait en short squeeze. Le reste est de la cuisine entre banquiers, gérée par le principal acteur sur le marché des métaux précieux, JP Morgan, qui tente d’éviter l’éclatement du marché.

Le taux d'emprunt sur l'argent

Comme nous le voyons sur ce graphique des trois dernières années, le taux d'emprunt sur l'argent (Silver lease rate) a décollé ces derniers mois :

 

 

Si l'on regarde à long terme, on constate que la hausse de ces taux a toujours été le signe avant-coureur d’une hausse des cours de l’argent.

Nous devrions assister à une hausse significative de l'argent dans les mois à venir.

 

 

US Mint

Sans tenir compte des 5 millions de pièces d’une once vendues par l'US Mint en janvier, qui est souvent un mois exceptionnel, on constate une baisse très significative des ventes, mois après mois.

Juillet n’atteint pas le tiers des ventes de février et représente à peine la moitié de celles d’avril ou de juin.

Ce n’est pas la demande qui fait défaut, loin de là, puisque les Wall Street Silver continuent d'acheter l'argent disponible à travers le monde, faisant monter la prime à 55% sur les Silver American Eagle. La semaine dernière, une grosse fortune du Texas a commandé 50 millions $ de pièces chez un revendeur, dont 900 000 Silver Eagles.

La baisse des ventes vient plutôt de la difficulté de la US Mint à trouver de l’argent pour frapper ses pièces.

 

 

Inde

Au mois de juin, l’Inde a pesé lourd sur le marché en important 1 000 tonnes d’argent.

Malgré le très faible volume d'importation en 2021, l’Inde a importé 3 429 tonnes au cours des 12 derniers mois.

 

 

Dans une vidéo publiée après le krach du marché du nickel sur le LME, Andrew Maguire avait laissé entendre que la confiance n’était plus là, que de très nombreux courtiers quittait le marché. D’après ses sources, il en était de même pour le marché des métaux précieux de Londres, et d’autres marchés allaient voir le jour. 

Le vendredi 29 juillet 2022, l’Inde a inauguré son propre marché de l’or et de l’argent : India International Bullion Exchange (IIBX). Dans son discours, le Premier ministre Norendra Modi a déclaré que le pays ne serait pas seulement connu comme étant un gros marché pour l’or et pour l’argent, mais aussi comme un teneur de marché (Market Maker).

Dans anticipation de l’ouverture de ce nouveau marché, l’Inde a rapatrié au printemps tout l’argent qui était jusqu’à lors stocké à Londres. Je ne suis pas le marché de l’or, mais ils ont certainement dû rapatrier aussi leur or.

La Chine a lancé son marché de l’or... la Russie également… et c’est maintenant au tour de l’Inde. 

De manière évidente, les BRICS ont décidé d’être indépendant du fixing de Londres ou New York.

Crise énergétique

Le coût de l’énergie s’envole :

 

 

Le prix du gaz a été multiplié par 20 au Japon et en Corée, puis par 48 au Pays-Bas.

L’Europe doit se contenter de 20% des capacités du Nord-Stream-1, en refusant de donner son feu vert pour l’ouverture de Nord-Stream-2... Qui joue contre son propre camp et mène l’UE à l’effondrement économique ?

Les cours de l’or et de l’argent étant intimement liés à ceux de l’énergie, la revalorisation des métaux précieux semble imminente.

Et si vous aviez l’esprit quelque peu machiavélique, vous pourriez penser que la COP26 est en train de réussir un coup de billard à cinq bandes.

La COP26 a déclaré la guerre au pétrole, au gaz et au charbon, se transformant instantanément en ennemi des pays producteurs.

L’OTAN et le G7 (c’est à dire les mêmes) ont appliqué des sanctions contre la Russie suite à l'invasion de l'Ukraine, amplifiant la crise énergétique.

En réponse, la Russie a arrimé sa monnaie et le pétrole à l’or et le 27 mars a dévoilé son projet de Bancor, un panier de monnaies garanti par un panier de métaux précieux et de matières premières.

L’Arabie Saoudite, l’Egypte, l’Iran, l'Argentine, la Turquie… sont candidats à rejoindre les BRICS, qui pourraient être prêts à lancer un système monétaire global favorisant les pays producteurs par rapport aux pays consommateurs.

Là où la diplomatie échouait depuis novembre 2008, la COP26 aura réussi en seulement un an a canalisé toutes les forces des nations émergentes vers un projet commun. Nous assistons à un changement géopolitique majeur sur l’échiquier monétaire.

L’inflation est une baisse de pouvoir d’achat de la monnaie. Pour s’en préserver, il faut se couvrir avec de l’or et de l’argent physique.

La reproduction, intégrale ou partielle, est autorisée à condition qu’elle contienne tous les liens hypertextes et un lien vers la source originale.

Les informations contenues dans cet article ont un caractère purement informatif et ne constituent en aucun cas un conseil d’investissement, ni une recommandation d’achat ou de vente.