L’Italie est ingouvernable, comme l’euro, avions-nous dit le 8 mars, juste après les élections générales italiennes ; nous venons d’en voir la confirmation. Alors que les deux vainqueurs (Luigi Di Maio du Mouvement 5 étoiles et Matteo Salvini de la Ligue) s’étaient finalement entendus sur un programme et un Premier ministre, après des semaines de négociations et d’atermoiements, le château de cartes s’est écroulé et il va falloir faire de nouvelles élections !
La pierre d’achoppement a été l’euro, ce qui est d’autant plus étonnant qu’il ne constituait pas un sujet de débat de la campagne électorale, aucun parti ne voulant revenir à la lire. Mais voilà, on ne peut pas faire abstraction de la monnaie unique, spécialement en Italie, où la dette publique atteint 132% du PIB (le pourcentage le plus élevé après la Grèce) et où le secteur bancaire est si mal en point. Le Président de la république, Sergio Mattarella, a refusé la nomination de l’eurosceptique Paola Savona au ministère de l’économie, sur laquelle ne voulait pas transiger Salvini. Résultat, tout le gouvernement tombe à l’eau, de nouvelles élections sont prévues cet été ou à l’automne, et un Premier ministre "technique", Carlo Cottarelli, un ancien du FMI, gèrera les affaires courantes d’ici là.
Le Président de la république s’est expliqué : "Non à quelqu'un qui professe la sortie de l'euro. Il en va du respect de l'épargne des ménages." Le plus haut personnage de l’Etat se soucie de l’épargne des ménages, nous voilà rassurés… En fait, cet épisode va ramener la question de l’euro au cœur de la prochaine élection italienne, et donc la dette publique et la santé très déficiente des banques. La monnaie unique revient comme un boomerang et, avec elle, la crise des dettes souveraines que la zone euro a connue en 2010-2011 avec la Grèce, l’Irlande, le Portugal, Chypre.
D’autant que l’Espagne est également confrontée à une crise politique : la condamnation de plusieurs membres du parti du Premier ministre Mariano Rajoy pour corruption accroît la probabilité d’élections anticipées d’ici la fin d’année dans le pays. Une nouvelle crise des dettes souveraines concernerait, donc, non plus des "petits" pays, mais l’Italie et l’Espagne…
Déjà les taux d’intérêt sur la dette italienne se tendent ces derniers jours, ainsi que sur les pays du Sud, et aussi sur la France, dont les banques sont très impliquées dans l’économie transalpine. On parle de transferts d’argent de l’Italie vers l’Allemagne, tant le système bancaire suscite de la défiance ; voilà qui ne va pas arranger le déséquilibre croissant de la balance Target2, qui transcrit les mouvements de capitaux à l’intérieur de la zone euro : l’Italie et l’Espagne plongent de plus en plus dans les déficits (plus de 400 milliards d’euros chacune) quand l’Allemagne accumule les excédents (près de 900 milliards d’euros). Les records atteints lors de la précédente crise des dettes souveraines sont dépassés, les épargnants ont de quoi être inquiet ; pas seulement les Italiens, mais tous les Européens…
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