Lorsque la crise de 2008 s’est produite, la Chine a eu une action très dirigiste : plutôt que de faire tourner la planche à billets en espérant que le crédit et l’investissement reprennent (comme le rêvent encore les banques centrales occidentales), le pouvoir central et les régions ont lancé de gigantesques plans d’infrastructures en obligeant les banques à leur prêter l’argent. Résultat le crédit a effectivement redécollé : de toute façon c’était un ordre de Pékin ! Alors qu’il chutait en Europe et aux Etats-Unis, le crédit bancaire total est passé de 100% du PIB en 2008 à 125% en 2010. Les grands travaux ont repris de plus belle en Chine et la croissance a maintenu son rythme en 2009 et 2010.

Evidemment, le problème avec ce genre de politique publique dirigiste, c’est des investissements à fonds perdus. Des quartiers et des villes entières sont vides, le réseau de trains à grande vitesse est surdimensionné, etc. Et cela finit par peser sur la croissance qui est loin des 10% d’antan, tout en générant des créances irrécouvrables qui fragilisent l’ensemble du système financier. Une situation dangereuse.

Finalement la Chine se retrouve avec un peu les mêmes problèmes que les pays qui ont choisi la planche à billets, sauf qu’elle a un beau réseau de trains à grande vitesse au lieu d’une bulle boursière. Au moins les rails on sait qu’ils resteront, alors que les records de Wall Street…

Et puis surtout la Chine a l’intelligence de ne pas tout parier sur des politiques monétaires et bancaires : elle achète également, dans le même temps, de très importantes quantités d’or. La banque centrale achète de l’or, et les particuliers sont encouragés à faire de même. On ne dispose pas de chiffres officiels, il s’agit d’un secret d’Etat, mais on peut estimer qu’entre l’or extrait dans le pays (400 tonnes par an) et les importations (800 tonnes), la Chine détient environ 4.000 tonnes d’or (soit l’un des stocks les plus élevés du monde), et peut être bien plus. En 2009, un groupe de fonctionnaires et d’économistes se réunirent pour discuter des mesures à prendre afin d’augmenter les réserves d’or du pays, en suggérant qu’elles devaient atteindre 6.000 tonnes dans les 3 à 5 années suivantes, voire 10.000 tonnes dans les 8 à 10 ans.

Il faut dire, on le sait peu, que la plus ancienne monnaie papier au monde a été créée en Chine, par le petit-fils de Gengis Khan, Kubilai Khan (1215-1294), que rencontra d’ailleurs Marco Polo lors de son voyage. Cette première expérience se termina en banqueroute, comme celle de John Law en France plusieurs siècles plus tard. La Chine connaîtra d’autres faillites monétaires au cours de son histoire, notamment au XXe siècle (lors de la prise du pouvoir par les communistes), elle sait ce que c’est (comme les Allemands par exemple).

Quoi qu’il en soit la Chine n’est pas dupe, face à la bulle du crédit qu’elle a crée, et dont les effets s’amenuisent, et face aux planches à billets largement utilisées en Occident, elle met en place une stratégie de secours qui se situe exactement à l’opposé des pratiques actuelles, qui créent des bulles. Les bulles peuvent exploser, en Chine et ailleurs, l’économie souffrira bien sûr, mais Pékin pourra se raccrocher à l’actif ultime, celui dont la confiance est universelle et inaltérable. Tous ne pourront pas en dire autant.

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