L’effondrement de quatre banques régionales italiennes (Banca Etruria, CariChieti, Banca Marche et Carife) commence à prendre une ampleur inquiétante. Il est vrai qu’elles totalisent tout de même un million de clients particuliers, 200.000 petites et moyennes entreprises, 12 milliards d’euros de dépôts, 25 milliards d’euros de financement et 7000 emplois.
Rome a dû mettre en place un plan de renflouement de 3,6 milliards d’euros abondé par les grandes banques du pays. Les comptes courants des clients sont, grâce à cette aide, sauvegardés. Cependant, une partie d’entre eux avaient souscrit des obligations émises par ces banques qui, désormais, ne valent plus rien. Environ dix mille clients doivent faire une croix sur un montant total de 800 millions d’euros ! Devant les protestations, et déjà un suicide, le gouvernement a concédé une enveloppe de 100 millions d’euros, qui ne couvrira qu’une partie des pertes.
Mais surtout, le plus révélateur de cette affaire, c’est que le gouvernement italien agit dans l’urgence, car il veut absolument éviter la mise en œuvre de la directive BRRD qui entrera en vigueur le 1er janvier 2016, en Italie et dans toute l’Europe. Car celle-ci, comme nous l’avons expliqué, fait reposer le renflouement d’une banque en faillite sur la ponction des comptes courants de ses clients. Le scandale aurait alors une toute autre ampleur, puisqu’il toucherait donc un million de clients particuliers et 200.000 entreprises. Ils seraient alors contraints de subir la ponction d’une partie de leurs économies et, en répercussion, c’est un bank run qui menacerait toutes les banques italiennes. On comprend l’empressement du chef du gouvernement, Matteo Renzi.
Effectivement, en mettant de côté le fait qu’elle légalise le vol des économies des épargnants, nous l’avons déjà dit, au moins pouvait-on considérer que la directive BRRD permettait de régler rapidement une crise bancaire. Dans le sang, mais efficacement, malgré tout. En réalité, cela se vérifie si toutes les banques d’un pays se retrouvent en faillite en même temps (comme à Chypre en 2013). Mais le cas italien nous montre un autre scénario : avec la faillite d’une ou plusieurs banques régionales (ou d’une grande banque systémique), la mise en œuvre de la directive BRRD conduit à la spoliation de plusieurs centaines de milliers de clients, ce qui provoque un choc à travers tout le pays, et un début de bank run dans les autres banques, ce qui met en péril l’ensemble du système financier. Voici la crainte de Matteo Renzi, qui explique son envie d’en finir au plus vite avant le 31 décembre.
C’est bien la peine ! La directive BRRD n’est même pas efficace, elle risque même d’amplifier une crise locale en une crise nationale et, donc, européenne. L’entreprise de spoliation des épargnants devient une bombe à fragmentation, le monstre a échappé à ses créateurs. Pour cette fois, l’Italie devrait parvenir à régler le problème d’ici la fin de l’année, mais à partir du 1er janvier, voici un nouveau risque explosif qui fait son apparition dans le paysage bancaire européen : la faillite d’une banque entraîne la spoliation de ses clients, ce qui produit un scandale national et un mouvement de panique, un bank run, puis finalement la déstabilisation du système financier national, et donc européen. Bravo, bien joué la Commission européenne !
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