Le Brexit a bon dos, le désordre qu’il provoque sur les marchés aurait obligé le gouvernement italien à intervenir d’urgence pour protéger son système bancaire. Tout ceci relève de la communication, les cours des banques italiennes s’effondrent, certes, mais la chute a commencé bien avant le référendum anglais, les maux qui les touchent sont plus profonds et anciens.
Les banques italiennes cumulent en effet 360 milliards d’euros de créances douteuses, ce qui équivaut à 22% du PIB (1.636 milliards d’euros en 2015), un ratio digne d’un pays émergent en faillite. Formellement tout cet argent ne s’est pas évanoui, il existe des garanties et des hypothèques, mais étant donné la lenteur de la justice italienne (une procédure d’insolvabilité dure en moyenne 8 ans, un quart d’entre elles dépassant les 12 ans), on peut quasiment tirer un trait sur ces milliards de prêts.
La dégradation date surtout de la crise de 2008, que l’économie italienne a encaissée de plein fouet avec un recul de 20% de sa production industrielle. Pourquoi les signaux n’ont-ils pas été allumés à cette époque ? Qui présidait la Banque d’Italie durant cette période, qui occupait le mandat de gouverneur entre 2006 et 2011 ? Mario Draghi, l’actuel président de la Banque Centrale Européenne, voilà qui est rassurant…
Alors Matteo Renzi, le chef du gouvernement, se débat pour éviter de couler corps et biens. Il existe une procédure pour résoudre les crises bancaires au sein de l’Union Européenne, il s’agit de la directive BRRD (Bank Recovery and Resolution Directive), dont nous avons déjà parlé, mais elle amène à ponctionner les comptes des épargnants disposant de plus de 100.000 euros, ou même en-dessous si cela ne suffit pas, et à ramener à zéro la valeur des obligations bancaires, que possèdent un grand nombre d’Italiens. Ce serait du suicide politique. Alors Renzi a négocié avec Bruxelles un fonds d’aide de 150 milliards d’euros de garanties publiques afin de tenir six mois et d’éviter toute panique bancaire, parce qu’on en est là.
Et pourquoi six mois ? Parce qu’une échéance cruciale se profile dans le courant du mois d’octobre : un référendum constitutionnel (limitation des pouvoirs du sénat) pour lequel Matteo Renzi s’est engagé à démissionner en cas d’échec, ce qui ouvrirait une grave crise politique. Et pour l’instant, les sondages penchent en faveur du non… En plus, le 2 octobre prochain aura lieu le nouveau 2e tour de l’élection présidentielle autrichienne opposant le candidat anti-immigration au candidat écologiste, suite à l’invalidation de la Cour constitutionnelle. Et ce même jour la Hongrie organisera un référendum pour s’opposer aux quotas de réfugiés dans l'Union Européenne. Voilà qui remettra la question de l’immigration au cœur des débats, ce qui influencera d’autant le vote des italiens, très touchés par la question, les poussant à un vote anti-UE. Une victoire du non amènerait de nouvelles élections législatives pour lesquelles le Mouvement 5 Etoiles de Beppe Grillo semble bien placé, et il s’est engagé à faire un référendum sur le maintien du pays dans l'euro…
Le Brexit c’était l’apéritif, ce qui se jouera en octobre c’est la place de l’Italie dans l’euro et dans l'Union Européenne ("Italeave"), sous la menace d’une crise bancaire qui ébranlera toute l’Europe, et d’un Etat surendetté (133% du PIB) et impotent. En attendant, profitez bien des vacances d’été.
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