Après le coup d’arrêt de l’économie américaine au dernier trimestre, dont nous avons parlé la semaine dernière, il faut admettre que la Chine ne sera pas la locomotive de remplacement pour tirer l’économie mondiale. Sa croissance ne cesse de ralentir, la demande intérieure peine à prendre le relais d’exportations qui plafonnent. La croissance du PIB demeure officiellement de l’ordre de 7% l’an – ce qui en soit se révèle à peine suffisant pour absorber l’exode rural – mais lorsque l’on se penche sur les grands secteurs industriels, les chiffres deviennent vraiment inquiétants : les productions de textile, d’électricité, d’acier, d’automobiles, d’équipements ménagers, connaissent des taux de croissance voisins de zéro, tandis que celle de ciment plonge de 20%.

Depuis le début de l’année 2014, les exportations n’augmentent plus, et elles ont même chuté de 15% en mars dernier. La Chine est confrontée à une hausse des coûts salariaux, et dans le même temps à une réévaluation du yuan qui, arrimé au dollar, se renchérit avec lui. Résultat, la compétitivité des usines chinoises se détériore. La demande intérieure a un temps été tirée par de grands travaux d’infrastructure financés à crédit (trains à grande vitesse, barrages, réseau routier, logements, etc.), mais ce levier atteint ses limites et pose des problèmes systémiques sur le plan bancaire et financier. La demande intérieure privée, le secteur des services et les nouvelles technologies – qui forment normalement les piliers d’une économie moderne, aux côtés de l’industrie – ne parviennent pas à entraîner suffisamment l’économie.

Que va décider Pékin ? Un QE géant ? Après le Japon, les Etats-Unis et l’Europe, le pays va-t-il se lancer dans un plan d’assouplissement quantitatif massif, à l’échelle de son économie ? Les spéculateurs en rêvent : toujours plus de planche à billets ! A son tour le yuan entrerait dans la guerre des changes, il ferait la course avec l’euro et le yen à qui perdrait le plus vite de sa valeur… Voici un scénario tout à fait envisageable. Avec une nuance cependant : à la différence des pays suscités, les autorités de Pékin croient en l’or physique et en achètent en grande quantité. Les chiffres sont secrets mais on estime que la Chine détient la deuxième réserve mondiale, après les Etats-Unis et devant l’Allemagne.

La Chine pourrait "jouer le jeu" des autres grandes puissances en laissant filer sa monnaie, mais quand la bulle obligataire explosera, quand les taux de changes et d’inflation deviendront hors de contrôle, elle disposera alors d’une assurance tout risque : ses réserves d’or physique. Elle pourra alors rafler la mise avec une crédibilité monétaire dont seront singulièrement dépourvues les autres puissances, exsangues. Ou au moins, elle pourra limiter les dégâts, ce que ne pourront pas se permettre tous les pays.

Nous verrons bien. Quoi qu’il en soit, le ralentissement de l’économie réelle se confirme partout dans le monde, tandis que se généralisent les expédients monétaires (taux zéro, planche à billets). Cette situation est porteuse de risques systémiques gravissimes. Comme aux échecs, ou au jeu de go, ceux qui sont capables de penser plusieurs coups à l’avance s’en sortiront.

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