Pour comprendre le phénomène de l'inflation, vous avez deux camps :

- Celui des économistes.

- Celui de deux experts, tels que Jacques De Larosière et Pascal Blanqué : l'un fut à la tête du Trésor, du FMI, et de la Banque de France ; l'autre, fut un des plus grands gestionnaires financiers en Europe.

Pour débuter, quelle est leur légitimité pour parler d'inflation ? Voici leur parcours professionnel : 

  • Après avoir été directeur du cabinet de Valéry Giscard d’Estaing, ministre de l’Economie et des Finances (janvier-mai 1974), Jacques de Larosière devient successivement directeur du Trésor (1974-1978), directeur général du Fonds Monétaire International (FMI) (1978-1987), inspecteur général des finances (1981). En 1987, il accède au poste de gouverneur de la Banque de France, poste qu’il occupe jusqu’en 1993. A la sortie de cette fonction, la présidence de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) lui est confiée (1993-1998).  (Source)

  • Pascal Blanqué débute sa carrière en 1991 au sein de la gestion institutionnelle et privée chez Paribas où il occupe notamment le poste de Directeur adjoint de la recherche économique entre 1997 et 2000. Il rejoint ensuite le groupe Crédit Agricole où il est nommé Directeur des études économiques et Chef Économiste jusqu’en 2005. Directeur des Investissements et Responsable des plateformes de gestion d’ Amundi (ex Crédit Agricole Asset Management) de 2005 à 2022, il prend également la direction du Pôle Institutionnel et de la Distribution Tiers de 2010 à 2017. Il est nommé Chairman de l'Amndi Institute et devient membre du Comité de Direction et du Comité Exécutif d'Amundi en février 2022. En tant qu’économiste et historien Pascal Blanqué est l’auteur de nombreuses contributions. Son travail de recherche porte sur les sujets monétaires, le fonctionnement des marchés financiers et les fondements philosophiques de l’économie. Il est membre de plusieurs Think Tanks tels que la Société d’Economie Politique, le Club 300, le MSCI Advisory Council et le Comité Bretton Woods. Pascal a été nommé « CIO européen de l’année » en 2013, 2018 et 2021 par Funds Europe. Il est également lauréat du Prix 2016 « European Manager Lifetime Achievement Award » décerné par Institutional Investor. Son ouvrage « 10 semaines en Covid-19 – Psyché, monnaie et narratifs – Une interprétation de la crise » a obtenu le prix « Turgot d’économie financière » en 2022. Pascal Blanqué est ancien élève de l’École Normale Supérieure. Il est diplômé de l’IEP Paris et Docteur en Sciences de Gestion de l’Université Paris-Dauphine.  (Source)

J'insiste sur leur CV, car ce qui m'agace le plus chez les universitaires, c'est leur manque de pratique qui les amène à expliquer par la théorie des phénomènes complexes quitte à tordre la réalité du terrain vécue par les financiers.

Pour ceux qui n'ont pas le temps d'écouter les 24 minutes de discussion entre Jacques De Larosière et Pascal Blanqué sur BFMTV, voici quelques extraits :

 

 

"En réalité, derrière cette poussée d'inflation et ces phénomènes d'offre sur les matières premières, il y a une création monétaire qui a été excessive, et qui s'est petit à petit propagée dans le corps économique et social."

"C'est cet excès de création monétaire qui finit par nous rattraper avec l'inflation."

Jacques de Larosière, ex-gouverneur de la Banque de France, pèse ses mots : il ne parle pas de création monétaire, mais "d'excès", à savoir le surplus de création monétaire qui ne correspond à aucune création de valeur réelle, mais qui sert juste la finance et la spéculation.

 

 

"L'inflation est néfaste car ça tue l'économie, ça tue les revenus réels, ça appauvrit les populations, en particulier les moins riches, et donc c'est une taxe qui ne dit pas son nom, qui n'est pas votée par le parlement, et qui finit par être régressive du point de vue social."

 

 

"Avoir une économie qui au 2/3 sert les 10% de la population qui peuvent eux bénéficier de cette enflure monétaire (phénoménale), c'est quand même une question sociale et politique majeure."

Avons-nous prix la mesure du pouvoir de la création monétaire?!

 

 

"L'endettement c'est l'illusion qui nous fait croire que nos excès sont normaux."

 

 

Je suis convaincu au plus haut point qu'il est impossible de comprendre l'économie sans faire siennes des notions abstraites qui sont de l'ordre de la philosophie, de la métaphysique, de l'invisible. Ce que dit Pierre Blanqué ici, vaut de l'or :

 

 

Ce financier explique que l'inflation n'est pas seulement un phénomène monétaire, mais aussi un phénomène psychologique. La valorisation des actifs et des matières premières s'inscrivent dans des phénomènes d'oublis et de mémoires.

Quand la mémoire du passé ressurgit, le temps s'accélère. En d'autres termes, nous sommes rattrapés par le réel, qui nous extrait de l'illusion de la dette, qui vient nous rappeler nos excès, et nous met sous le nez la facture à régler. Nous sommes en train de vivre ce moment !

Cela rejoint l'idée que la finance est le commerce du temps : la dette permet de prendre de l'avance sur le temps. Quand l'endettement devient excessif, nous accélèrons trop le temps, jusqu'à ce que la machine s'enraille, et que le réel nous rattrape.

Toutes les notions exprimées par ces hommes de terrain, ils les ont acquise par l'expérience. Ce n'est pas un économiste enfermé dans son bureau et dans ses théories, qui peut arriver à ces notions qui sont acquises grâce à un mélange d'expérience, d'analyses, et d'intuitions !

La propagation lente de la monnaie, le phénomène psychologique de l'inflation, les notions d'oublis et de mémoires, l'idée du rétrécissement et de la dilatation du temps : ces notions sont le fruit de la pensée de deux praticiens qui poussent la réflexion au-delà de l'apparent !

Cette idée de dilatement et de rétrécissement du temps détruit les réflexions sur l'inflation des économistes, fondées sur des corrélations entre des séries de données historiques. Le vécu de ces experts, c'est ce qui manque le plus à ces économistes pour comprendre l'inflation.

En résumé :

- L'inflation est une taxe qui ne dit pas son nom.

- Elle est subie par les classes moyennes.

- Elle est le fruit amer de l'excès de création monétaire.

- La création monétaire sert les 10% les plus riches.

- L'inflation sonne la fin de l'illusion de la dette infinie.

- L'inflation est un des symptômes d'une monnaie fondée sur la dette avec intérêts : "En fait, sans aucune exagération, le mécanisme actuel de la création de monnaie par le crédit est certainement le cancer qui ronge irrémédiablement les économies de marchés de propriété privée." — (La Crise mondiale d'aujourd'hui. Pour de profondes réformes des institutions financières et monétaires., Maurice Allais, éd. Clément Juglar, 1999, p. 74)

Source originale: @AniceLajnef

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