C’est la petite info de la semaine, qui est passée sous les radars, mais sur laquelle il faut revenir : la banque qui possède la plus forte exposition aux produits dérivés dans le monde n’est pas la JP Morgan, comme on le pensait, mais la Deutsche Bank. Comme l’indique son rapport annuel 2012, la banque est exposée à hauteur de, attention retour à la ligne :
55.605.039.000.000 euros, autrement dit 55.605 milliards d’euros, 55 mille milliards d’euros, ou 55,6 trillions d’euros, ouf.
Par comparaison, le PIB de l’Allemagne s’élevait à 2012 à 2.644 milliards d’euros, ce qui signifie que les engagements de la première banque du pays dans les produits dérivés sont vingt fois plus élevés que toute la richesse crée en un an dans la première puissance économique européenne. Converti en dollars, cela représente 72,8 trillions de dollars, soit un peu plus que la JP Morgan. L’Europe détient le record, la première banque au cœur du pays le plus solide, bravo !
Mais il ne faudrait pas s’inquiéter selon les comptables de la banque allemande, car tous ces engagements sont compensés et, au final, l’exposition nette ressort à 20,3 milliards d’euros seulement. C’est ce qu’expliquent les dirigeants des grandes banques lorsqu’on met ce sujet sur la table : les positions s’équilibrent. Quand un engagement est pris sur un produit dérivé, la banque achète une protection (la position inverse) pour se prémunir.
Mais au fait, à qui achète-t-elle cette protection ? A une autre banque… En réalité toutes les grandes banques se vendent des produits dérivés, ce qui signifie que si l’une d’entre elles fait faillite, toutes les autres plongent ! Les protections vendues par la banque en faillite s’évanouissent, et les autres banques voient leur exposition nette exploser et tombent également. C’est ce qui a failli se produire avec la faillite d’AIG en septembre 2008 qui était la contrepartie de nombreux établissements financiers, et qui a été sauvée en catastrophe par l’Etat américain. Le calcul de l’exposition nette est ainsi purement théorique. Les dépôts de la Deutsche Bank représentent un centième de ces 55,6 trillions d’euros de produits dérivés, Chypre à côté c’est de la rigolade.
Toutes les grandes banques se tiennent ainsi en équilibre sur une montagne de produits dérivés qui devient très friable en période de crise. Il y a tout de même un point positif dans cette affaire : le siège de la Deutsche Bank se trouve à Francfort, comme celui de la BCE, ainsi Mario Draghi n’aura que quelques rues à traverser en cas de problème.
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